mercredi 29 juin 2022

FÊTE DE L’HUMANITÉ : LE CHANT GÉNÉRAL, D'HIER À AUJOURD’HUI

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MIKIS THEODORAKIS LORS DU CONCERT CANTO GENERAL,
À LA FÊTE DE L’HUMANITÉ, LE 7 SEPTEMBRE 1974.
ARCHIVES JOURNAL L’HUMANITÉ, 1974 
Créée en 1974 à La Courneuve, la cantate de Mikis Theodorakis et Pablo Neruda sera à nouveau jouée sur la Grande Scène de l'édition 2022 de la Fête.

par Clément Garcia


DE GAUCHE À DROITE MIKIS THEODORAKIS,
 MATILDE URRUTIA, PETROS PANDIS , 
 PABLO NERUDA,  EN 1972 À PARIS

C’est un événement qui attend le public de la Fête de l’Humanité. Le Chant général, œuvre du musicien grec Mikis Theodorakis, décédé l’an dernier, éponyme du fameux recueil du poète chilien Pablo Neruda dont elle emprunte les vers, s’élèvera de la même scène qui l’a vu naître il y a quarante-huit ans, à la date ­anniversaire du coup d’État de Pinochet, le dimanche 11 septembre. Une manière sensible de tisser un lien entre hier et aujourd’hui, La Courneuve et Le Plessis-Pâté, d’où la Fête s’élancera désormais.

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Si la cantate a longtemps symbolisé la lutte contre la dictature pinochetiste, elle fut composée dès 1971 en soutien au gouvernement d’Unité populaire dirigé par Salvador Allende. Il se dit que le président martyr sélectionna lui-même les poèmes à mettre en musique. La mort suspecte de Neruda, quelques jours après le coup d’État, empêchera le poète et le musicien d’y mettre un point final. C’est donc la Fête de l’Humanité qui accueillit sa création un an plus tard.

Du dictateur aux colonels

Le Chant général sera cette année interprété par le chœur du Canto, dirigé par Jean Golgevit, qui défend l’œuvre de longue date, accompagné par la mezzo-soprano Gabriela Barrenechea. Un symbole, encore : ­émigrée chilienne, la chanteuse avait 15 ans lors du coup d’État.

Elle se souvient encore du bruit des hélicoptères et du dernier discours d’Allende entendu à la radio familiale. « Plus tard, avec le père de mes enfants, membre du MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire  – NDLR), nous avons été arrêtés. J’ai ensuite dû vivre cachée avec mon enfant avant d’arriver en France en 1980. »

Elle se prend alors de passion pour la partition, qui s’accorde parfaitement à la tessiture de sa voix. «Neruda y décrit l’arrivée des Espagnols, les massacres de populations et évoque un paradis perdu. Le parallèle est évident avec l’ingérence des États-Unis en Amérique latine. »

« C’est une œuvre qui trace un autre parallèle, entre deux pays aux trajectoires similaires », ajoute la cantatrice. D’Athènes à Santiago, le Chant général nous parle aussi d’un destin commun. Dans les années 1970, le Chili prenait le relais funeste d’une Grèce placée sous le joug des colonels. Plus récemment, les deux peuples ont tenté d’arracher la camisole des institutions financières internationales en se choisissant des gouvernements de gauche.

Theodorakis, déjà, relevait en 1974, dans l’Humanité, l’analogie entre le Chant général, « le livre poétique et le témoin de l’histoire », et « la musique du rebetika, musique d’unification du peuple, musique des réfugiés d’Asie Mineure, ­musique qu’on a toujours voulu étouffer ». « C’est le même souffle », concluait-il. Un souffle qui, entre bouzoukis et rythmes andins, emportera, sans nul doute et à nouveau, le public de la Fête.

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